Bain d’orage à Nernier
La portière claque et tu sais déjà que c’est une mauvaise idée. A tes pieds, la boue beige du parking trace des ravines. Sur la tête, les plocs de gouttes qui te semblent peser un kilo chacune. Mais, bon. Ça va passer, hein. Quelques mètres, les rues piétonnes se dévoilent. Les couleurs éclatent, lavées par l’averse. Les fleurs, le lierre, les vieilles maisons de pierre. Ici, un couple en tee-shirt et en tongs réfugié sous le toit d’un lavoir attend la fin de l’orage. Ils seront huit au retour. Evidemment, la pluie redouble, explose, rebondit, se glisse dans les moindres failles de ton imper impuissant. C’est un temps à ne rien mettre dehors. D’ailleurs, tu es seul dans la rue.
Le lac est en vue, tu presses le pas à mesure que la pluie forcit. Il te semble que tu devras bientôt nager pour regagner la voiture. Un homme en short est planté au milieu d’un jardin, la tête tournée vers les nuages et les yeux fermés. On dirait qu’il a attendu ce moment toute l’année. Quand tu manques de glisser sur les gros pavés des berges, tu les aperçoit, dans l’eau, ignorants de la tempête qui monte. Ils te renvoient un regard rempli d’étonnement, comme si, dans cette scène, c’était toi, l’anomalie. Le temps de te demander s’ils possèdent des branchies dissimulées derrière les oreilles et tu as déjà fait demi-tour.
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